14 novembre 2006

 

Ségolène Royal, le risque salutaire

Elle représente le mouvement, l'avenir. Comment ne peut-on pas voir que sa candidature est une chance pour la France?

Par Régine Saint-Criq, Maire - Présidente de l'Association Parité
LIBERATION.FR : mardi 14 novembre 2006


Aujourd'hui les commentateurs de tous bords sont perplexes face au phénomène Ségolène Royal. Cette situation les déconcerte et parfois les rend furieux. Pourquoi n'est-elle pas ce que logiquement elle devrait être à leurs yeux, un perroquet savant qui récite une leçon bien apprise? Pourtant elle sort de l'ENA, elle fait partie de l'élite prévisible. Alors quoi ? Après avoir constaté avec amusement que son non-conformisme faisait des ravages dans l'opinion, on craint aujourd'hui que cela perdure et ne devienne un réel atout électoral.
Alors les explications pleuvent. C'est une femme, séduisante qui ne sait que sourire: c'est bien la preuve qu'elle n'a rien à dire, qu'elle n'a rien dans la tête. La démocratie participative ? Un gadget pour Présidente de Région, certainement pas une vraie solution pour faire adhérer nos compatriotes au débat politique.
Même accusation pour la désignation de jury populaires chargés d'évaluer l'action des élus en cours de mandat: au mieux un joujou poujadiste et au pire un penchant pour les solutions staliniennes. Il y a aussi les agacements vis à vis du comportement. En effet, pour Ségolène Royal, l'affrontement n'est pas son style, ni sa tasse de thé: quel scandale ! C'est vraiment pas normal. Donc elle "refuse le débat" et la confrontation des idées. Elle est inconsistante, voire dangereuse pour le camp qu'elle prétend représenter et défendre. Pensez donc, que pourrait-elle espérer avec une telle attitude face à ce génie du débat télévisé qu'est Sarkozy ? Déjà ,un homme ce sera très difficile, alors un femme qui ne joue pas le jeu...
Malgré toutes ces mises en garde, les Français continuent à lui accorder un intérêt marqué. Alors comment peut-on l'atteindre ? Le scandale ? Trop tôt.
Alors on cherche dans les archives. Exemple: le candidat Mitterrand s'exprimant clairement sur son engagement contre la peine de mort, tout en sachant que l'opinion ne le suivait pas sur cette voie. Par similitude, pourquoi Ségolène Royal n'a-t-elle pas la même attitude à propos de l'entrée de la Turquie dans l'Union Européenne ? Comme si la situation et le sujet étaient de même nature ! On voit bien la manoeuvre : car enfin le problème de la peine de mort concernait uniquement la France, alors que le problème de la Turquie engage non seulement notre pays, mais doit répondre aux conditions imposées par l'Union Européenne.
Il est à craindre que l'entreprise de démolition ne s'amplifie. D'abord parce qu'il est tout à fait anormal qu'une femme se mêle d'affaires, jusqu'à ce jour, tenues par les hommes. C'est un désordre en soi. Au surplus elle refuse de s'inscrire dans le jeu traditionnel « des hommes » : celui de la harangue, des discours enflammés, des effets de style à la télé, cette place privilégiée qu'occupent les hommes de tout temps. En effet, elle affiche une préférence pour la rencontre simple et directe où la part de l'écoute l'emporte largement sur la promesse électorale formatée, déclamée du haut d'une tribune.
Sa candidature constitue un risque majeur,car Ségolène Royal n'offre aucune des qualités indispensables: compétence, ténacité, expérience, connaissance... A-t-elle vraiment lu le projet du PS ? Elle avoue même qu'elle n'a pas réponse à tout. A contrario les autres sont légitimes brillants, experts des questions les plus difficiles, courageux, en un mot aptes et prêts au défi qui les attend. Eh bien voilà, c'est bien là que le bât blesse. Ce prêt à élire sans risque, sans surprise, c'est aujourd'hui ce dont il faut se méfier le plus, de ces messages rassurants, de ces attitudes taillées sur mesures, de ces promesses enfin, prêtes à l'emploi.
Autrement dit, des candidatures du coin du feu qui ne dérangent pas. Des candidatures qui prolongent les traces laissées par les prédécesseurs. Du réchauffé. Aucun vrai changement en vue pour l'avenir du pays.
Alors risque pour risque, celui proposé par Ségolène Royal est bien plus porteur : c'est d'avenir -et du désir de s'y investir- dont il est question. Des valeurs à restaurer, des propositions à négocier. Et tandis que ses concurrents maintiennent le débat politique dans le statut quo, elle pousse le prohjet de démocratie participative, en vue de restaurer et refonder notre République. Ne pas voir, ne pas se rendre compte que le phénomène Ségolène Royal est une chance à saisir est une faute politique majeure. Qu'elle soit ou non désignée, élue ou battue, il y aura désormais un "avant" et un "après" Ségolène Royal qui marquera un tournant important dans notre pays. Enfin, le corps électoral aura envisagé, et peut-être décidé, qu'une femme puisse diriger le pays qui a grand besoin de repenser son avenir.


source:
http://www.liberation.fr/opinions/rebonds/election_presidentielle/217035.FR.php

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